chapitre 101 image
A mon réveil, je suis déjà pensive, tout en fixant le plafond, je me projette dans ce que je vais faire aujourd’hui. Je vais tenter de voir Estelle, de lui parler, mais surtout de lui présenter mes excuses.

J’ai beaucoup mieux dormi que les précédents jours, il faut dire que j’ai eu beaucoup de soutien aussi. Kévin m’a dit que les parents d’Estelle ne seraient pas là aujourd’hui, c’est le meilleur moment pour moi d’essayer quelque chose.

Je me lève, j’ai la sensation d’être déterminée, malgré le fait d’avoir des doutes, des peurs. Ma mère me sourit, me laissant prendre tranquillement mon petit déjeuner dans le calme. Après m’être préparée en vitesse, je me dirige avant tout vers une petite pâtisserie de quartier, pour prendre le gâteau préféré d’Estelle.

Je voudrais mettre toutes les chances de mon côté, ne pas simplement me pointer avec ma tête triste. Durant mon trajet jusque chez elle, je tente de répéter mes mots, encore une fois, de trouver la meilleure façon de l’aborder.

Lorsque j’arrive chez elle, j’ai dû me répéter des milliers de scène dans lesquels je lui parlais, soit en pleurant, en étant ému, souriante ou triste aussi qu’elle me rejette. J’ai vraiment tout imaginé, mais ne sais vraiment pas à quoi m’attendre.

Arrivée devant la porte du hall, je profite de rentrer quand un occupant de l’immeuble en sort. Cela fait une étape en moins, je ne voulais pas sonner chez Estelle, et lui dire que j’étais en bas. Je monte les escaliers, je suis sur le pas de la porte.
Stressée, me demandant maintenant ce que je fais là, si je n’ai pas l’air ridicule avec ma petite boîte de gâteau, il ne faut pas que je commence à vouloir faire marche arrière. Je prendre une grande respiration, puis je sonne.

Devant cette porte, dans un silence absolu, mon cœur résonne, j’ai l’impression d’avoir un tambour dont la frappe ne s’arrête pas. Il me semble avoir sonné depuis trente secondes, ou peut être plus, ou moins, je ne sais plus vraiment, en tout cas, l’attente semble interminable.

J’entends enfin des pas, puis la serrure, pour enfin voir cette porte s’ouvrir. Dans cette minuscule ouverture je peux voir le visage d’Estelle, fatiguée, encore endormie on dirait, puis surpris de me voir là.

Estelle : Ju… ?
Moi : attends s’te plaît, ne ferme pas la porte
Estelle : ce n’était pas mon intention
Moi : d’accord, j’ai eu peur que tu me ferme la porte au nez
Estelle : qu’est ce que tu fais là ?
Moi : je… je suis venue, pour…                       
Estelle : on dirait que tu ne sais pas du tout pour quelle raison tu es là
Moi : si, si, j’ai juste du mal à…

Mon cœur bat fort, devant le visage froid d’Estelle, je me perds dans mes pensées, mes mots n’arrivant pas à sortir. Je ferme les yeux un instant, puis je compte jusqu’à trois, en inspirant grandement.

Moi : je, je te demande pardon, vraiment pardon pour ce que je t’ai fait, excuse moi

Ce n’est pas la façon la plus efficace sans doute de présenter des excuses, mais ce sont là les seuls mots qui ont pu sortir de ma bouche à ce moment là. Voilà maintenant que je suis prise de peur, des milliers de questions surgissent, à savoir comment elle va réagir, et ce que je vais pouvoir dire par la suite.

Estelle : attends Julia, tu es sérieuse, tu viens comme ça chez moi sans prévenir, me présenter des excuses, si on peut appeler ça des excuses, et tu penses que je vais tourner la page, comme ça ?

Ses mots sont assommants, comme un coup, pris en plein cœur, tandis que je tente de chercher mon souffle pour lui répondre. Je dois lui présenter des sincères excuses, lui dire ce que j’ai pu ressentir ces derniers jours, mais aussi lui dire combien je me suis aperçue du mal que j’ai pu lui faire.

Je commence à avoir des larmes aux yeux, mes lèvres tremblent, je me doute que je ne dois pas être belle à voir, mais je n’arrive pas à me contrôler, seulement à me concentrer sur les mots que je devrais lui dire.

J’ai peur, je pleure, je ferme les yeux, puis mes mots tentent de sortir…

Moi : je suis, vraiment désolée, tu dois sûrement penser, que je suis la pire des amies… pour t’avoir oublié comme je l’ai fait. Alors que toi, tu as toujours été là pour moi, à m’encourager, à me supporter. Je voudrais tant changer les choses, revenir en arrière, et ne pas agir comme je l’ai fait. Ces derniers jours, ça a été l’enfer pour moi… me dire que je t’ai blessé, que tu ne veuille plus me voir, tout ça c’est trop pour moi… et c’est pourtant ce que je t’ai fait vivre…

Estelle : oui, tu nous as blessés, tu n’as vraiment pensé qu’à toi, on n’existait vraiment plus, à part le fait que tu nous dises bonjour le matin, ou au revoir, il n’y avait plus rien. Même si on mangeait tous ensemble le midi, c’est à peine si tu nous adressée la parole. Je ne t’ai vraiment plus reconnue…

Moi : je ne me suis plus reconnue aussi, j’ai vraiment tout fait de travers avec toi…
Estelle : avec moi ?! Tu as pensée à Kévin, je parle de nous là, ça inclus aussi Kévin tu sais…
Moi : j’ai, j’ai déjà parlé avec Kévin, hier… je pensais vous trouver tous les deux, puis il m’a dit combien tu étais mal
Estelle : vous avez déjà parlé ? Et comment il est ? Il ne m’a rien dit
Moi : il était triste de ne plus m’avoir, mais il était heureux pour moi et Guillaume, puis on a discuté, ça va aller, c’est lui qui m’a dit que tu serais seule aujourd’hui
Estelle : pfff, Kévin est trop gentil…
Moi : oui j’ai de la chance de l’avoir, et je voudrais avoir la chance de te garder aussi
Estelle : ce n’est pas aussi facile tu sais, qui me dit que tu ne vas pas recommencer, nous abandonner une nouvelle fois ? Hein ?
Moi : j’ai pris conscience de ce que j’ai fait, et je ne veux pas non plus que ça recommence, je tiens à vous, je tiens à notre amitié, je tiens à tout ce qu’on a partagés ensemble
Estelle : pourquoi tu l’a fais alors ?
Moi : je… je ne sais pas, je ne sais vraiment pas
Estelle : ah tu ne sais pas ?… et bien moi je sais que jamais je ne vous aurais abandonné toi et Kévin, pour rien au monde. Alors peut être que tu t’es remise en question, peut être que Kévin t’a pardonné, mais moi j’ai encore du mal à ce que ma meilleure amie m’oublie du jour au lendemain

La porte se referme brusquement devant moi, dans un vacarme raisonnant dans les escaliers. Estelle était vraiment en colère, ses yeux brillaient, mais le scénario que je redoutais le plus est arrivé. Je n’ai pas su lui dire les bons mots sans doute, pas su m’abaisser devant elle, pas su comprendre sa douleur.

Je reste plantée là, pendant deux minutes à pleurer seule dans ce silence qui me pèse. Je tourne doucement les talons, il n’y a plus aucun son si ce n’est celui de mes larmes qui s’écrasent sur la boîte de gâteau.

Je descends avec difficultés les escaliers jusqu’à sortir dans la rue, dehors un passant me regarde en larmes sans pour autant plus réagir que cela. Je me sens seule au monde, une douleur intense me gagne dans ma poitrine.

Je ne sais vraiment plus quoi faire, je prends mon téléphone, je pense appeler ma mère, lui demander de venir me chercher, je n’ai vraiment plus la force de marcher. Je suis totalement perdue, je n’arrive pas à appuyer sur cette touche, comme paralysée.

Pourtant dans ma main, au même moment, mon téléphone se met à vibrer, je baisse les yeux, c’est un appel de Guillaume.

Moi : allo… (En pleure)
Guillaume : oh mon cœur, ça ne va pas ?
Moi : en fait… ça s’est mal passé
Guillaume : merde, tu es où là ?
Moi : toujours en bas de chez Estelle, je…
Guillaume : je ne sais pas où elle habite, il y a un endroit pas loin où je peux te retrouver ?
Moi : il y a la pizzeria, ou le salon de coiffure au coin de la rue
Guillaume : d’accord, je vois c’est où, j’arrive au salon de coiffure, d’ici 10 minutes
Moi : d’accord je t’attends

Avoir entendu la voix de Guillaume m’a sorti un moment de cette angoisse, je retrouve peu à peu mes esprits, puis je traverse la rue en direction du salon de coiffure. Je tente de m’essuyer un peu, certains regards dans la rue ont l’air de me juger encore plus que celui d’Estelle.

Je patiente un peu, je n’aurais pas attendu longtemps avant de voir mon chéri débarquer en courant. Il arrive essoufflé, puis me prends dans ses bras, me demandant comment je vais.

Je n’arrive pas vraiment à parler, seulement à pleurer dans ses bras en tentant de prononcer des mots. Il me console comme il peut, en me disant qu’il me ramène chez moi, mais je n’en ai pas envie. Je lui gâche déjà sa journée, je ne voudrais pas non plus gâcher celle de ma mère.

Guillaume me dit alors de le suivre, que nous allons chez lui pour être tranquille. Je me demande si c’est une bonne idée, je ne voudrais pas créer plus de problèmes surtout avec son père. Il me rassure très vite, il est absent depuis hier soir, il ne sait pas quand il rentrera, mais que je n’ai pas à me soucier de ça.

Marcher aux côtés de Guillaume me vide un peu la tête, bien sûr je repense toujours aux mots d’Estelle, son visage ferme, et cette porte qui se referme devant moi. Heureusement que Guillaume est là, il me soutient, me guide pendant le trajet, sinon j’aurais été perdu, errante sans but.
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