chapitre 136 image
En me levant ce matin, je repense encore à ce qui s’est passé hier. J’ai le sourire aux lèvres lorsque je retrouve ma mère pour le petit déjeuner. Elle me demande alors ce qui peut me faire sourire ainsi, mais je ne lui dis rien, à part une excuse bidon.

Heureusement sur le moment, je me suis rendu compte que j’ai oublié de prendre la pilule du lendemain. Je repars vite dans ma chambre, la cherche, puis en l’avalant je me dis que je vais sûrement le regretter aujourd’hui, sachant d’avance ce qui m’attend.

Après le petit déjeuner, une fois prête, je suis en route pour retrouver mes amis et mon chéri. La journée s’annonce habituelle, une matinée normale, des cours parfois ennuyeux, puis la pause déjeuner.

C’est lors de la reprise des cours l’après-midi que les choses ont été bousculées, si je puis dire.

Alors que je rentre dans la salle, je commençais à ressentir les effets de la pilule, quelques vertiges suivi de maux de ventre. Mais en plus de cela, il y a le groupe de garçon qui est déjà présent, et se chamaillent comme à leur habitude.

Je dois dire que le bruit me donne un peu plus mal à la tête, je n’ai qu’une hâte, m’assoir et passer cet après-midi le plus vite possible. Sauf qu’en allant à ma place, une voix m’appelait. Je n’avais pas compris sur le moment ce que l’on m’a dit, surprise que l’on s’adresse à moi, puis il recommença.

Youssef : oh Julia, je te parle
Moi : oh pardon, je n’avais pas entendu
Youssef : ouais, je commençais à croire que tu me snobais
Moi : euh non, pas du tout
Youssef : humm tu sais, on te matte depuis un moment maintenant, et franchement, t’es grave bonne

A ce moment là, je n’ai pas su quoi en penser, j’étais perdu. Le fait déjà d’avoir ce mal de tête et que Youssef s’adresse à moi directement alors qu’aucun garçon ne l’avait fait avant, du moins pas de cette façon. Puis le fait qu’il, ou plutôt « qu’ils » me matent, puisque c’est ce qu’il a dit.

Et pour finir, ce mot « bonne » qu’il a utilisé, ça m’a comme donné un coup. Je ne lui ai rien demandé, et il se permet de m’aborder et de me dire tout ça, qu’est ce qu’il cherche ?

Tout en étant perdu dans mes pensées, Youssef continuait de me parler, claquant des doigts devant mon nez pour me ramener sur terre. Mais j’avais complètement décroché, et n’avais rien entendu de ce qu’il avait pu me dire.

Youssef : oh, je te fais des compliments et tout, et toi tu planes
Moi : désolée, c’est juste que… mais tu veux quoi ?
Youssef : wesh, comment ça je veux quoi ? Tu veux m’afficher ou quoi ?
Moi : non, non, je…
Youssef : attends je suis là, poli, je te dis que t’es devenu grave coquine, et toi t’en à rien a faire
Moi : non, ce n’est pas ça, je…

Je commençais vraiment à me sentir mal là, physiquement mais aussi mentalement ne sachant plus quoi faire pour me sortir de cette situation. Youssef est très impressionnant là devant moi, il a une voix déjà grave pour son âge, d’origine africaine, grand mince, habillé bien souvent d’un survêt. Il aime jouer les troubles fêtes, se mettant couramment à dos les professeurs et la plupart des élèves, c’est quelqu’un qui aime se faire remarquer.

Et en cet instant, tout le monde nous remarquait très bien. Je le voyais bien que je l’avais énervé, vu le ton de sa voix, mais ce n’était vraiment pas fait exprès. Autour de nous, il n’y avait aucun bruit, les regards étaient fixent, attendant de voir la suite.

A ce moment là, un autre garçon, Mehdi, est venu pour parler à Youssef. Lui disant de se calmer, qu’il n’avait pas à me parler comme ça.

Youssef : wesh, Mehdi, c’est quoi le blem, pourquoi tu te lève, je cause tranquille là
Mehdi : gros, tu commence à faire peur à Julia, et c’est toi qui l’affiche là
Youssef : mais mêle toi de ton cul mec, qu’est ce qu’y a, tu craques pour elle c’est ça ?

Honnêtement je ne savais plus du tout quoi faire, ils étaient là à se parler, moi debout au milieu de la salle, un mal de ventre me gagnant de plus en plus. Les autres élèves nous regardaient, et sincèrement, oui je me sentais de plus en plus mal. Jusqu’au moment ou le professeur entre dans la salle.

Il avait entendu quelques bouts de conversation, et avait deviné ce qui se passait. Au vu des histoires récentes qui ce sont déroulées, nous avons pour le coup, tous finis au bureau du CPE.

Nous avons attendu environ dix minutes avant d’y entrer, je soufflais comme je pouvais pour me calmer, mais aussi pour que mon mal se passe, puis surpris de me voir là, le CPE me demande ce qui s’est passé. Mais franchement, ma timidité avait repris un peu le dessus sur moi, de même que je ne voulais pas dire quelque chose qui pourrait nuire à mes camarades.

Devant mon silence, c’est Youssef qui prit la parole, expliquant ce qui s’est passé de son point de vue. Apparemment il voulait me parler, me féliciter de mon changement personnel, qui se faisait ressentir de jour en jour et voulait m’encourager à continuer ainsi.

Je n’ai pas l’impression que ce soit vraiment la vérité, ou alors, j’avais vraiment mal compris ses mots, ses intentions. Nous avons passés un moment dans le bureau à démêler cette histoire, puis à la fin le CPE me demanda si tout cela était vrai.

Voulant en finir avec tout ça, car je sentais vraiment mes nausées s’intensifier, mais surtout ne pas apporter de problèmes aux garçons, je lui dis que oui, que j’avais tout simplement bloquée comme d’habitude.

Le CPE libère alors Youssef et Mehdi, il me demande de rester un instant pour me parler. Une fois les garçons partis, il m’invite à m’asseoir.

Il me dit alors, qu’il connaît très bien le cas de Youssef pour être un fouteur de trouble et menteur. Pour le cas de Mehdi, il a un dossier sur lui également, mais c’est plus parce qu’il est là au mauvais endroit, au mauvais moment. Il n’a rien à voir avec Youssef, c’est au contraire un gentil garçon.

Le CPE se doute bien alors de ce qui s’est passé, mais ma timidité, mon silence, fait qu’il ne peut pas appliquer de sanction envers Yousef si je ne parle pas. Il comprend tout à fait que j’ai peur, peut être pour ce qui pourrait se passer si je parle, mais que devant certaines situations, je me dois de parler.

Il me dit alors que pour cette fois, il laisse les choses se passer, surtout pour moi. Mais que si ça venait à se reproduire, que je peux venir lui en parler seul à seule, et qu’il prendrait alors les mesures nécessaire, sans que cela puisse me nuire.

Il y a déjà eu cette histoire avec Marguerite, il ne tient pas à ce que mon nom soit ajouté à la liste, surtout me connaissant. Il tient d’ailleurs à me féliciter, au vu des progrès personnel que j’ai pu faire, mes professeurs et lui-même ont toujours eu une bonne appréciation à mon sujet. Mon changement de personnalité se fait voir de jour en jour, et il tient à ce que je continue ainsi.

C’est pour cela qu’il insiste, si un problème se présente à nouveau avec Youssef, de ne pas hésiter à venir lui en parler.

En sortant du bureau, je me sens soutenue, protégée et fière que l’on puisse me remarquer, moi qui me pensait insignifiante voir invisible. Même si Youssef a été pour le moins grossier, dans l’ensemble j’existe aux yeux de tous.

C’est ce que je retiens de tout cela, bien entendu, cette petite histoire à vite fait de faire le tour du collège. A la sortie, Guillaume vient me demander si je vais bien, et qu’est ce qui s’est réellement passé.

Je lui explique à lui et nos amis ce qui s’est passé en gros, il était très furieux que Youssef ce soit adressé à moi de cette façon. Mais je lui dis de ne rien faire, sinon c’est lui qui aura des problèmes, de plus que je me sentais vraiment mal avec les effets de la pilule.

Guillaume comprend alors mon état, n’en dit pas plus et me raccompagne à la maison. Sur le chemin du retour, nous ne faisons qu’en parler, bien que cela me donne toujours plus mal à la tête, je le calme comme je peux, le rassurant aussi au passage que je vais bien et que dans l’ensemble, même si à un moment j’ai pu ressentir le début d’une crise de panique, je m’en suis pas mal sortie.

Si tout le monde peut remarquer mon évolution, alors il faut que je prenne chaque chose comme un moyen de progresser, quel qu’il soit.

En arrivant chez moi, la première chose que je fais est d’aller aux toilettes pour vomir. Je n’en reviens pas que j’ai pu me retenir tout l’après-midi. Guillaume est là, me rassurant, tenant mes cheveux en arrière. Je l’aime tant, quand j’y repense c’est la première fois que je le vois énerver, voulant prendre ma défense comme mon chevalier vaillant.

Mais je ne veux pas qu’il ait de problème, ou alors qu’il ne se fasse mal. Parce que Youssef est quelqu’un de grand, mince, mais bagarreur, ça je le sais.

Après avoir vomis tout ce que je pouvais, je me rince le visage, me nettoie, puis nous nous installons confortablement dans le canapé. Guillaume se sent coupable de mon état, l’avoir fait sans préservatif hier dans cette salle de cinéma. Mais c’est moi qui ai surtout pris les devant, donc il n’a rien à se reprocher.

Lorsque ma mère rentre, elle vient de suite me voir, me disant qu’elle avait eu l’appel du CPE, qui lui avait expliqué en gros l’histoire. Je la rassure de suite, mais bon, comme toute mère, elle est paniquée, et m’écoute à moitié.

Et surtout en me voyant avec mes yeux gonflés et brillant comme si j’avais pleuré, il me faudra pour le coup un bon moment pour qu’elle se calme, qu’elle puisse entendre toute l’histoire.

Guillaume est resté avec nous aussi longtemps qu’il le pouvait, après qu’il ne soit parti, nous restons toutes les deux en tête à tête, parlant encore de ce qui s’est passé, mais aussi de mon ressenti, mes questionnements etc. Nous en discutons dans le salon, puis dans un bain chaud, ainsi qu’à table.

Nous avons vraiment fait le tour du sujet, cherchant même à excuser le comportement de Youssef, en essayant de comprendre qui il est. Jusque là, il ne m’avait jamais adressé la parole, ni les autres garçons, surtout qu’ils savent très bien quel est mon problème.

Alors pourquoi aujourd’hui ? Qu’est-ce qui a pu lui donner une raison de venir me parler ainsi ?
Je n’aurais sans doute jamais cette réponse, à moins de le lui demander directement, mais ce serait comme lui donner une raison valable de recommencer. Et honnêtement, je ne souhaite pas m’attirer plus d’ennuis que ça.

Mais je pense trop, et c’est aussi le cas pour ma mère, elle a toujours été soucieuse de mon bien être, mais la voir aussi paniquée, je pense que c’est bien la première fois. Elle sait toujours garder la tête froide, mais cette fois-ci, qu’un garçon comme Youssef vienne me parler ainsi, ça l’a totalement déstabilisée.

C’était une situation nouvelle pour elle comme pour moi, et vu que ça s’est passé en milieu scolaire, elle a peur que cela ne se reproduise.

Bien que je ne semble pas plus choquée que cela, ou du moins, j’ai l’impression de mieux me maîtriser, ma mère vient s’allonger avec moi, dans mon lit. Elle me réconforte toujours du mieux qu’elle peut, elle m’enlace, me caresse les cheveux et nous finissons par nous endormir toutes les deux ainsi.
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